samedi 10 février 2018

La souffrance est-elle utile en prépa ?

Bonjour,

Aux yeux de certains, les classes prépas permettent de faire le tri entre ceux qui méritent de réussir et ceux qui ne le méritent pas.

Pour ce qui est de la valeur de cette représentation, elle est quelque peu mise à mal par des chercheurs qui feront hérisser le poil de plus d'un défenseur des classes prépas et des concours : Les concours, une tradition française faussement méritocratique Le Monde, le 9 février 2018.


Le débat est ouvert...
Le sujet que je souhaite aborder aujourd'hui n'est pas celui du mérite par lequel j'ai commencé, mais celui de la souffrance.

En effet, souffrir en prépa pourrait être une solution pour faire partie des élèves les plus méritants.

Certains élèves imaginent par exemple qu'en dormant très peu la nuit, ils vont mettre toutes chances de leur côté.

D'autres vont faire des efforts surhumains pour y arriver, pensant que c'est la meilleure solution.

Je vous propose de distinguer les efforts et la souffrance.

Les meilleurs élèves des classes prépas ne souffrent pas. Ils font de leur mieux. Ils travaillent tout le temps. Ils sont excellents.

Peut-être que par le niveau d'exigence qu'ils s'imposent, certains d'entre-eux en souffre, pour une durée limitée. C'est-à-dire qu'ils font des efforts, qu'ils s'accrochent, qu'ils font preuve de ténacité.

Si vous souffrez pour atteindre les mêmes résultats, rien ne vous garantit que vous êtes sur la bonne voie.

Pour définir l'excellence, Joël Guillon, qui accompagne les entrepreneurs et les consultants indépendants, aurait plutôt tendance à décrire l'inverse. Il part du principe qu'il faut réhabiliter la "facilité" au lieu de la négliger ou de la dévaloriser.

Le système scolaire encourage régulièrement les efforts. "Continuez vos efforts !".

En fait, Joël Guillon précise à ceux qui dévalorisent ce qu'ils font "facilement" : "C'est facile pour vous, mais pas pour les autres".

La première stratégie consiste donc plutôt à travailler ses points fort que ses points faibles. Travailler ses points faibles, c'est la garantie de faire beaucoup d'efforts sans obtenir les résultats attendus.  Au contraire, travailler ses points forts demande moins d'efforts et permet d'aller beaucoup plus loin.

S'il y a quelque chose que vous faites facilement et rapidement, au lieu de le négliger et de le déconsidérer, c'est ça qu'il faut valoriser !

Vous pouvez bien décider, comme je l'ai fait avant vous, que les maths "c'est dur, donc c'est bien". Valoriser les efforts, les défis, les sommets inatteignables et vous y lancer à corps perdu.

Vous pouvez donner l'impression que ce qui vous attire le plus, c'est "l'impossible" et la plupart du temps, justement y parvenir. Vous le ferez a quel prix ? Au prix de quels efforts ? Au prix de quels sacrifices ?

Et si le premier sacrifice, c'était vous-même ?

Parce que vos forces et vos atouts, c'est vous-même.
Parce que vos envies et vos facilités, c'est vous-même.

Au contraire, suivre la tendance, écouter les attentes de la "société" de toujours plus de maths, d'ingénieurs, d'informaticiens ou de financiers, ce n'est pas la garantie de vous y retrouver à l'arrivée.

On fait les classes prépas pour "ne se fermer aucune porte". Quand on se retrouve ensuite en maths sup, en prépa HEC ou plus tard en école d'ingénieur ou de commerce, on se rend compte qu'on s'est claqué la porte sur les doigts.

Toutes ces portes qu'on a voulu laisser ouvertes, n'ouvrent sur rien. Ni sur la passion, ni sur la vie. Ne pas faire de choix, c'est se fermer à tout. Ce n'est pas après 5 ou 6 ans d'études - et de formatage, à mes yeux, dans les écoles de commerce en particulier, parce qu'il faut le reconnaître, un élève ingénieur c'est un rebelle en T-shirt à côté d'un élève d'école de "management" - puisqu'on n'y fait plus du commerce, mais du marketing et de la communication - qu'on reprend sa vie en main pour faire un école de cinéma, monter un groupe de rock ou étudier la philo, la psycho ou la permaculture.

En fait, si, c'est exactement ce qu'on fait. Disons que c'est exactement ce qu'est en train de faire notre génération de trentenaire (et plus jeune) qui ne se reconnait plus ni dans les valeurs de l'entreprise - qu'elle soit privée ou publique - ni dans les tâches qu'on lui assigne.

Bore out. Au minimum. Avez-vous vu le site de "Fuyons la Défense" ? Avec le sous-tire "Ils ne nous méritent pas.

Burn out. Les députés LREM ont décidé que ça n'existait pas. Que ça ne méritait même pas le débat parlementaire. C'est dire s'ils ne connaissent pas les entreprises. Ni les Renault, ni les Peugeot, ni les Alcatel bien disparu, ni les CISCO.

Encore moins les hôpitaux, les collectivités territoriales et tous ces lieux où les moyens ont été enlevés mais les missions restent à assurer auprès des usagers.

Les "jeunes" pas si jeunes, refusent de perdre leur temps dans un bureau à remplir les timesheet excel de McKinsey ou BCG comme mes copains il y a 15 ans. Ils refusent de patienter 15 ans dans les méandres des grandes entreprises pour avoir une "promotion" digne de ce nom et pouvoir faire ce qui leur avait été confié à 21 ans pendant leur année de césure.

Aujourd'hui, ceux que je suis, ceux dont je lis les articles sur "medium" refusent de consacrer leur vie professionnelle à s'ennuyer dans un bureau ou à vendre de l'eau à New York : https://enquetedesens-lefilm.com/.

Du coup, ils préfèrent monter des fermes biologiques et des formations en permaculture : Maxime de Rostolan pour Fermes d'Avenir...

Et vous, allez-vous commencer par faire bac+5 avant de réfléchir à votre projet professionnel ?
Allez-vous passer 5 ans à étudier avant de vous demander quel métier vous voulez exercer ?

La phrase-clé il y a trente ans, c'était "Passe ton bac d'abord !"
Aujourd'hui, on ne le formule plus, tout le système éducatif est construit pour l'imposer : "Passe ton bac + 5 en Grande Ecole d'abord !"

Il y a un piège. Au cœur de son livre pourtant très marketing et com "Rich dad, poor dad", Robert Kiyosaki dit une chose très juste : ceux qui "gagnent" vraiment, dans la vie, et leur vie, ce sont plutôt les joueurs de foot et les stars de rock. Ils gagnent des revenus en millions d'euros. Ingénieur c'est génial mais ça commence à 2000 ou 2500 euros par mois pour monter à 5 ou 10 000. Si on veut aller au-delà, il faut passer par la case direction ou MBA.

C'est quand même plus rapide de gagner 10 000 euros par mois en étant directeur commercial ou avocat d'affaires international qu'en étant expert technique dans une entreprise TIC. Non ?

Et même dans les structures où il y a le plus de moyens, ce n'est quand même pas super fun et glamour de gérer les systèmes d'informations des grands organismes financiers ? Quitte à vouloir détruire le monde et les gens qui habitent dessus, autant être directement trader. Ca me parait plus direct et plus efficace.

Spéculer sur les matières premières alimentaires - disons sur la nourriture des populations pauvres, comme ça c'est plus clair - c'est quand même plus efficace comme moyen de s'enrichir tout en détruisant les autres, que de simplement mettre à disposition un logiciel plus efficace ou un réseau informatique plus performant ?

Tout ça pour dire que si vous êtes en souffrance en prépa, ce n'est peut-être pas une fatalité.

D'abord, contrairement à ce que vous pensez et ce qui semble se dire autour de vous, il y a d'autres alternatives

Ensuite, contrairement à ce que vous pensez, vous pouvez prendre tout ça un peu plus à la rigolade, parce qu'il y a beaucoup plus de places dans beaucoup plus d'écoles valables que ce que vous pensez.

Enfin, parce que contrairement à ce que vous pensez peut-être, les polytechniciens ou les centraliens ne font pas tous les plus belles carrières, les HEC ou les ESSEC ne sont pas tous les plus intelligents et les plus brillants.

Nombreux parmi eux, ne trouvent pas de sens à ce qu'ils font ou ce qui leur est demandé en entreprise. D'autres s'excusent 20 ans plus tard : J'ai fait HEC et je m'en excuse

Et vous, vous en êtes où ?

Bonne journée

Gabriel



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